Projet de Recherche

2023-2024
In Their Own Words (ITOW)*
In Their Own Words (ITOW)* cherche à explorer et à rassembler le répertoire riche et pourtant largement délaissé des conversations d’artistes femmes, réalisés dans la phase pionnière des arts et de l’histoire de l’art féministes. Parallèlement, il vise à produire une méthode de transmission orale dans le contexte d’une histoire inclusive de l’art contemporain. Symptôme d’une confiance dans le potentiel cognitif du récit personnel et de l’accès direct aux pratiques, l’interview sonore et le podcast sont utilisés dans ce projet pour témoigner d’une gamme diversifiée de voix et de perspectives dans des histoires officielles encore largement lacunaires.
ITOW explore les contextes dans lesquels le retour de la forme dialogique de l’interview artistique peut contribuer à établir une méthodologie propice et adaptée à une histoire de l’art contemporaine inclusive, consciente des nouvelles formes de documentation offertes par l’entretien et des contributions féministes essentielles dans ce domaine. Or, si la revalorisation des entretiens sonores nous confronte au défi de trouver le moyen d’incorporer ces données dans le récit plus large de l’histoire de l’art, elle requiert de développer de nouvelles façons de les analyser. Quelle part l’obsolescence technologique joue-t-elle dans les formats sonores adoptés ? Quel impact auront eu les limites de diffusion et d’archivage dans la prise en compte de ces sources ? Quelle est l’importance du type d’informations recueillies, la légitimité de l’interview et la durée de sa valeur de renseignement ? Dans le cadre contemporain du podcast, l’entretien opère autant comme un dispositif d’enregistrement de l’histoire en train de se faire que comme un outil rétrospectif, visant à repenser la pratique artistique de manière collective. En quoi une telle forme est-elle moins fiable ou légitime qu’un récit relaté par une seule voix ? Dans quelle mesure la composition et le montage sonores diffèrent-ils de la pratique consistant à transcrire un événement et, de manière plus ou moins collaborative, à le monter sous une forme « as-told-to » ?

2019-2024
Décolonisation du socialisme : les enchevêtrements de l’internationalisme. Une étude transdisciplinaire de projets cinématographiques et cybernétiques datant de la Guerre froide en Allemagne de l’Est et présentant un intérêt pour le XXIe siècle
Le but de ce projet de recherche axé sur des cas d’étude est de proposer une analyse décoloniale de projets datant de la Guerre froide qui ont soit été négligés ou ont fait l’objet de peu de recherches, dans les champs de la cybernétique, de l’internationalisme, des arts et du cinéma, et qui présentent un intérêt pour le XXIe siècle.
Situé dans le domaine des cultures visuelles, ce projet de recherche fait appel à des approches pratiques pour proposer une analyse critique, fondée sur des cas d’étude, des pratiques artistiques en cours dans les états socialistes européens durant la période de la Guerre froide, avec une attention particulière pour les concepts opératoires de la cybernétique et de l’internationalisme. Dans ce contexte, l’approche transdisciplinaire, transhistorique et pratique du projet vise à favoriser l’appréhension des mouvements anticoloniaux, des actions antifascistes et des initiatives solidaires, au cours de la Guerre froide, en lien avec les débats de l’époque sur la technologie, la science, la techno-politique, la philosophie et l’art, ainsi que la signification et les conséquences de ces débats pour nous aujourd’hui.
De plus, le projet de recherche suit les principes de « pratiques de recherche avancées » dans le champ de l’art contemporain, telles que développées par l’EFAP (Forum européen des pratiques avancées), https://advancedpractices.net, soutenu par l’action du COST (Coopération européenne dans le domaine de la recherche scientifique et technique) 2018-2020.

Institution requérante: HEAD – Genève, Master en Arts visuels, CCC – Programme de recherche, Département des Arts visuels
Requérant et coordinateur de projet: Prof. Dr. Doreen Mende
Equipe de projet: Collaborateur de projet Vinit Agarwal, Chercheur doctorant Lea Marie Nienhoff, Prof. Dr. Kenny Cupers, Université de Bâle
Partenaires de projet: Prof. Charles Esche, Musée Van Abbe, Eindhoven, Dr. Anselm Franke, Maison des cultures du monde Berlin
Financement: FNS
Cofinancement: HEAD – Genève

2017-18
Atlas de l’Anthropocène à Genève (TAAG, pour The Anthropocene Atlas of Geneva).
Il s’agit d’un projet de recherche sur le long terme, qui se propose d’étudier la façon dont les représentations des mutations environnementales mondiales de nature anthropocénique sont construites, partagées et mises en pratique, dans le quotidien d’une ville de Suisse. Dans un contexte où les interprétations scientifiques des données mondiales pénètrent de manière croissante les sphères du discours public, et où le nombre de personnes faisant l’expérience directe des changements environnementaux ne cesse d’augmenter, des rencontres et des débats animés s’organisent, qui traitent des implications concrètes, éthiques et politiques. TAAG explore ces discours, les processus de représentation qui les étayent et les initiatives et pratiques qui y répondent parmi les institutions gouvernementales et scientifiques genevoises, les ONG locales et les réseaux artistiques et militants de la société civile à Genève.

Le terme « anthropocène » reflète un consensus nouveau au sein de la communauté scientifique, selon lequel les processus sociaux à l’œuvre dans le monde interagissent et altèrent profondément les processus biophysiques de la planète. Le chaos climatique, l’augmentation de la toxicité à l’échelle mondiale et l’extinction des espèces font partie des formes de changement anthropocénique les plus médiatisées et débattues. Apparu dans la littérature scientifique en 2000, le terme « anthropocène » s’est rapidement diffusé dans les milieux académiques et s’est imposé dans les médias et la culture populaire. Il désigne des mutations indéniablement préoccupantes et pressantes, et pose à nouveaux frais et avec force des questions élémentaires concernant le rapport des êtres humains aux communautés vivantes non-humaines et aux assemblages terriens. En outre, ces mutations affectent des valeurs et des identités culturelles et politiques profondément ancrées, et soulèvent des questions dérangeantes en matière de justice environnementale et de spécisme. Ainsi, la masse croissante de littérature relative à l’anthropocène donne lieu à des débats essentiels sur l’éthique et la politique des changements environnementaux, ainsi que sur l’héritage et l’avenir de la modernité capitaliste. Le terme même d’ « anthropocène » prête à controverse, certaines voix critiques plaidant pour l’utilisation d’autres vocables tels que le « capitalocène » (Andreas Malm, Jason Moore, Donna Haraway), le « chthulucène » (Haraway), l’ « écozoïque » (Eileen Crist), et le « nécrocène » (Justin McBrien). TAAG se donne pour objectif de repérer les traces, échos, réverbérations et autres effets de ces communications et débats tels qu’ils prennent forme en un lieu particulier.

TAAG est un projet de recherche interdisciplinaire par les moyens de l’art, qui prend pour socle les contributions des études critiques, culturelles, féministes et post-coloniales, et qui se situe au croisement des études scientifiques, des humanités environnementales et des études animales. La recherche sur l’anthropocène constitue un mode d’investigation collective, transversale à de nombreuses disciplines traditionnelles, aspirant à faire la synthèse des savoirs émergents et à associer les méthodologies de façon pertinente et productive. TAAG s’inspire également d’une histoire riche en innovations artistiques et interdisciplinaires, axée sur les archives et les atlas, stimulée par l’Atlas mnémosyne d’Aby Warburg, œuvre pionnière. L’atlas, qui associe une logique combinatoire métonymique et intuitive à de rigoureuses compétences de recherche, devient ici une forme d’organisation d’archives autant qu’un outil méthodologique, destiné à orienter et catalyser la recherche.

L’équipe de chercheuses et de chercheurs de TAAG regroupe Gene Ray, professeur associé au CCC, et Aurélien Gamboni, Janis Schroeder et Kate McHugh Stevenson, ancien-ne-s diplômé-e-s du CCC. Ses travaux bénéficient du soutien d’un groupement de recherche consultatif constitué de chercheuses et de chercheurs et d’artistes internationa-les-ux. Successeur du projet de recherche « Cultures Émergentes de la Durabilité » (Emerging Cultures of Sustainability) (mené au CCC entre 2010 et 2014), TAAG a obtenu l’appui financier du Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS) jusqu’à fin 2018. Les activités de recherche seront accessibles au public grâce à la mise en ligne d’un fonds d’archives, et par l’intermédiaire d’un site internet et d’une exposition.

2012-2014
Politiques et initiatives mémorielles et pratiques artistiques dans les processus de paix et de reconstruction [PIMPA/PPR], co-dirigé par Pierre Hazan et Catherine Queloz
Le projet Politiques et initiatives mémorielles et pratiques artistiques dans les processus de paix et de reconstruction [PIMPA/PPR] étudie la représentation dans l’espace public des violations massives des droits de l’homme. Depuis les années 1980, la volonté de faire mémoire se manifeste par une multiplication d’initiatives mémorielles: création de mémoriaux, instaurations de minutes de silence, changements de noms de rues, expositions thématiques d’art contemporain, développement d’un « tourisme noir » sur les lieux de massacres ou de camps de concentration.

Toutefois, malgré l’importance croissante des initiatives commémoratives dans l’espace public, le rôle des pratiques artistiques reste encore relativement peu étudié, ceci en dépit du fait que les initiatives mémorielles apparaissent comme faisant partie intégrante des politiques de réconciliation. Ainsi, bien que de nombreux chercheurs dans les domaines des droits humains, des Peace Studies, des sciences politiques, de l’histoire et de la philosophie aient reconnu l’importance des initiatives mémorielles dans les processus de réconciliation, ils prennent rarement en considération la question de la forme artistique et de l’impact sociétal de ces initiatives.