Conférence Ericka Beckman | Auditoire James-Fazy

Pour les étudiant-e-s de 1ère année / 2ème année / 3ème année.

Conférence de l’artiste Ericka Beckman le lundi 13 décembre à 17h, Auditoire de James Fazy.

L’équipe d’Information fiction a le plaisir d’accueillir l’artiste américaine Ericka Beckman pour une conférence autour de ses derniers projets. Ses films associent performance, manipulation d’objets et langage, sur des musiques composées par Brooke Halpin. Comme d’autres artistes de la Pictures Generation, elle met à l’épreuve les représentations identitaires construites par la culture industrielle. Reach Capacity et Stalk questionnent les limites du champ d’action des individus, alors qu’ils sont pris dans une structure économique qui les dépasse.

Reach Capacity (2020) est une installation vidéo projetée sur un écran rotatif. Sa structure en deux parties reprend le principe du plateau de jeu réversible du Landlord’s Game conçu par Elizabeth Magie. Dans cette version antérieure au Monopoly, la face compétitive pouvait être renversée pour rééquilibrer la distribution du capital. Beckman transpose cette forme ludique dans le contexte de la reconstruction du sud de New York, suite à la catastrophe du World Trade Center, où le travail des ouvriers de chantier s’oppose à la déambulation oisive des promoteurs immobiliers. Sur le tissu urbain se superpose un espace symbolique généré par des techniques d’animation, une dimension virtuelle où l’agencement des parcelles peut potentiellement se réorganiser. En contrepoint à la croissance des tours répond l’étendue des terrains agricoles expropriés, au nord de la ville industrielle de St. Louis. Si le milieu des forces de production est pris en étau, un dynamo fait bouger les lignes des déterminismes sociaux.

Présentée lors du festival Performa à New York, Stalk (2021) est la première performance réalisée par Beckman. L’artiste réinterprète le conte de Jack et le Haricot magique, où un enfant acquiert un haricot magique qui lui permet d’atteindre le ciel et de voler le trésor d’un géant. Tandis que la fable popularisée au 19ème siècle incite à croire aux opportunités illimitées du capitalisme, Beckman travaille la structure narrative qui oppose le monde du bas à celui du haut, avec les paroles de la musique ainsi que le décor d’images vidéo diffusées sur des panneaux en LED, passant des terres cultivées aux données abstraites de la bourse. Dans la langue anglaise, le nom du protagoniste est chargé de diverses connotations. « Jack » renvoie au bûcheron, à l’homme à tout faire, au marteau-piqueur, au gros lot, ou encore au connecteur audio. Ces résonances culturelles façonnent un personnage aux multiples facettes, apparaissant sous la forme de l’ouvrier agricole, de l’acrobate, de l’entrepreneur et d’un pantin à ressort. Jack a pour mission de négocier les dettes des fermiers avec les banques, mais le vertige du marché l’incite à mener un double jeu. Le monde du bas mobilise d’autres ressources en captant l’énergie du vent.

Née en 1951 à Hampstead, aux États-Unis, Ericka Beckman a étudié au California Institute of the Arts avec Vito Acconci, Yvonne Rainer, Bruce Nauman et John Baldessari. Des expositions monographiques ont été organisées par le MIT à Boston, le MoMA PS1 à New York, la Secession à Vienne, la Tate Modern à Londres, le Centre Pompidou à Paris et le Centre d’art Contemporain de Berne. Reach Capacity a été présentée à M Leuven en Belgique et au Kestner Gesellschaft de Hanovre, en Allemagne.

Geneviève Loup


Vue d’installation. Ericka Beckman, Reach Capacity, 2020 (copyright de l’artiste).